FFME iMag - Le magazine de la Fédération Française de la Montagne et de l’Escalade - 4 : Mars 2015

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4-dossier-Ouverture-Florence-Pinet-championnats-de-France-2014-a-Niort.jpg Florence Pinet, ouvreuse nationale lors du championnat de France de difficulté 2014.
4-dossier-Claire-Fieschi.JPG Claire Fieschi.
4-dossier-OUvreur-Florence-Pinet-Ch.-Fce-diff-2014-noirt.jpg Florence Pinet (nacelle de gauche) avec Gérôme Pouvreau, ouvreurs sur le championnat de France de difficulté senior de Niort 2014.
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Une ouverture rare et précieuse

L'ouverture au féminin

Les femmes ouvrent bien, mais elles sont largement sous-représentées dans le milieu de l'ouverture. Explications.

« L’intérêt d’avoir des filles dans une équipe d’ouverture, c’est qu’elles comprennent mieux comment fonctionne l’escalade des femmes… Et puis, c’est des gabarits différents, des morphologies spécifiques, et donc une nouvelle richesse dans une équipe d’ouverture. Car pour moi, une équipe d’ouvreurs, c’est un gigantesque shaker : on donne, on regarde les autres, on apprend. Les femmes permettent un brassage supplémentaire, un moyen d’apprendre de nouvelles choses. Pour ma part, je ne fais pas de différence entre un homme et une femme qui ouvre. Je me pose juste la question de savoir pourquoi les femmes qui ouvrent à niveau national se comptent sur les doigts d’une main ? » Jacky Godoffe.


Les femmes sont en effet très peu représentées chez les ouvreurs.


« Sur le pôle France de Voiron, explique Marianne Berger, je fais appel à une dizaine d’ouvreurs, dont une femme. Il s’agit de Florence Pinet, ancienne athlète de l’équipe de France de difficulté, qui a d’ailleurs ouvert le championnat de France senior de difficulté l’année dernière. Elle est capable d’ouvrir pour les meilleurs seniors hommes au niveau national. C’est la seule que je fais travailler ici, car à mon sens, c’est la seule qui a la capacité d’ouvrir des voies entre 8b et 8c, le niveau dont j’ai besoin sur le pôle ! »


Serait-ce donc une question de niveau, si l’on ne trouve pas de femme ouvreuse internationale ?


« Il y a quelques années, la Slovène Martina Cufar ouvrait sur des coupes du monde, et puis elle a eu le bonheur d’avoir un enfant…, continue Marianne Berger. Et nous ne l’avons pas encore revue. Je pense que c’est un peu la raison du fait de l’absence des femmes à l’ouverture pour le plus haut niveau, il faut maintenir un niveau de pratique et d’expertise extrêmement élevé, sans cacher non plus que les hommes ouvrent très bien pour les femmes. Après, les choses changent, de plus en plus de filles athlètes de haut niveau demandent à passer le diplôme d’ouvreur national, c’est le cas d’Hélène Janicot, qui était curieuse de passer de l’autre côté de la barrière. Si je doute que l’on obtienne un jour la parité, je pense que les filles vont commencer à oser entrer dans les équipes d’ouverture ! »


Témoignages


Nous avons rencontré Florence Pinet et Claire Fieschi (qui ouvre depuis l’année dernière sur la coupe de France de difficulté de Riom). L’occasion de recueillir quelques précieux témoignages de femmes ouvreuses !


Quand avez-vous commencé à ouvrir, et pour quelles raisons ?


Florence Pinet : J'ai commencé l'ouverture en 2011. La raison ? Le challenge de la compétition ! Je trouve ça vraiment intéressant d’avoir à m'adapter aux niveaux des grimpeurs et de leur proposer des voies sympas à grimper, et surtout, d’essayer d'analyser ce qui marche et de le mettre en œuvre, sans oublier non plus de régaler les spectateurs ! Et puis je crois qu’après toutes ces années de compétitions, j'avais cette curiosité d'aller voir de l'autre côté de la barrière et je me suis surprise à adorer le challenge lancé et la pression que procure l’ouverture… et les compétiteurs !


Claire Fieschi : J’ai commencé à ouvrir d’abord en bloc, il y a de ça quelques années, puis dans la salle de mon club (RAPPEL), lorsqu’on a eu une nouvelle salle, il y a cinq ans. Tout ça de façon sporadique et bénévole. Puis, lorsque j’ai passé le DE et que j’ai été embauchée sur mon poste actuel, j’ai parallèlement passé le diplôme d’ouvreur. J’ai donc commencé à ouvrir pour aider, dans un engagement bénévole, car je trouve cela très intéressant au niveau de la réflexion sur l’activité escalade. Maintenant que je suis DE, c’est en plus très complémentaire avec mon travail d’entraîneur. Par ailleurs, ça me plait car c’est un beau moyen d’expression qui s’avère en plus être très formateur, car on a des contraintes qu’il faut respecter (cotations, styles, catégories, etc.).


Que pensez-vous qu'une femme apporte dans une équipe d'ouvreurs ?


FP : Le fait d'être une femme en ouverture me semble pour moi important car c'est un sport mixte où la femme, avec ses qualités de grimpe, peut et se doit d’apporter beaucoup aux hommes. Après, on apporte ce qu’on maîtrise et ce qu’on aime. Pour ma part, je préfère ouvrir dans des voies, car mon expérience en compétition s'est essentiellement faite en "difficulté", cela dit, j'adore jouer et le bloc est une discipline dans laquelle on peut se permettre plus d'excentricités !


CF : Elle apporte des gâteaux ! Non, plus sérieusement, les hommes n’ont pas la même escalade. C’est un peu cliché, mais quand même, il faut avouer qu’en règle générale, ils sont plus forts physiquement. Et donc il arrive parfois qu’ils ne se rendent pas bien compte de la difficulté des mouvements qu’ils proposent. En tant que « faible » femme (rires), je teste, et je leur dit ce que je pense. Mais pour l’instant, j’ai ouvert avec des gens qui avaient de l’expérience, donc ces problèmes se sont relativement peu posés. Après, je fais peu de différence entre les hommes et les femmes dans ma vie en générale, tout comme dans mon travail, donc quand j’ouvre, je me considère avant tout comme ouvreur, le fait que je sois une femme n’est pas déterminant.


Avez-vous rencontré des difficultés particulières du fait que vous soyez une femme ?


CF : Absolument pas ! Il faut dire que les grimpeurs ne sont pas tellement machos, du moins pas ceux que je côtoie. Je dirais même qu’en tant que fille, on prête un peu plus attention à moi (sans favoritisme). Peut-être ai-je eu la chance de tomber sur de chouettes ouvreurs ?


FP : En ouverture, je n'ai pas particulièrement rencontré des difficultés en tant que femme, il faut juste connaître la charge de travail qui nous attend, et s'y atteler... Elle n’est pas mince sur les compétitions, mais à chacune de commencer à son rythme, en ouvrant tranquillement dans son club.


Savez-vous pourquoi si peu de femmes ouvrent aujourd'hui ?


FP : Je pense que l'ouverture c'est un peu comme du bricolage, et donc, ça plait plus aux hommes… Sans faire de mauvaises généralités, toutes les femmes n’aiment pas forcément monter sur des échelles et jouer de la visseuse ou de la clé de 12… car c’est aussi ça être ouvreur.


CF : Après nous sommes moins nombreuses que les hommes dans le milieu professionnel de l’escalade, et probablement que nous nous mettons des barrières toutes seules. Pour ma part, je ne pensais pas avoir le niveau, ce sont les dirigeants de mon club (notamment Mme Janicot) qui m’ont d’abord motivée puis soutenue dans cette entreprise. Je les en remercie !


Auriez-vous des solutions à proposer pour en inviter de nouvelles à prendre le chemin de l'ouverture ?


CF : Des visseuses et des clés roses, des nacelles à fleurs ? Non, sans rire, je ne suis pas forcément pour les quotas, mais peut-être qu’il faudrait inciter davantage les organisateurs de compétition à intégrer des femmes dans les équipes d’ouvreurs… reste à savoir comment ?


FP : Je n’ai pas non plus spécialement de solutions. C’est l’envie de transmettre et donner qui fait qu’on accroche avec l’ouverture. Je pense également qu’il faut aimer son sport profondément pour y trouver beaucoup de plaisir. Pour ma part, je me régale à créer des mouvements et je prends encore plus de plaisir à voir des grimpeurs les appréhender à leur manière. Si on aime l’escalade pour les sensations qu’elle procure, et la richesse gestuelle qu’elle nous offre, alors, il faut se lancer, ça ne coûte rien d’essayer !

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