FFME iMag - Le magazine de la Fédération Française de la Montagne et de l’Escalade - 3 : Décembre 2014

Archives

Toutes les vidéos

Aide

Télécharger le PDF

Collapse

Uncollapse

Soyez informé de la mise en ligne de votre prochain E-Mag

Envoyer Fermer

Votre inscription à la newsletter a bien été prise en compte.

Votre inscription a échoué

* Champs obligatoires

3-rencontre-medical-PBY-Portrait-MtBlanc.jpg Pierre Belleudy, médecin fédéral

Les cinq questions à poser à l’athlète. Si deux cases sont cochées la probabilité de présence d’un TCA est de 85%


Vous faites-vous vomir parce que vous vous sentez mal d’avoir trop mangé ?

Vous inquiétez-vous d’avoir perdu le contrôle de ce que vous mangez ?

Avez-vous récemment perdu plus de 6 kg en 3 mois ?

Pensez-vous que vous êtes grosse alors que d’autres vous trouvent trop mince ?

Diriez-vous que la nourriture domine votre vie ?

Détail des signes observables

Signes psychologiques

Se trouve trop gros malgré un poids normal, inquiet ou préoccupé par l’alimentation, le décompte des calories, la préparation du repas, l’acte alimentaire, éprouve un sentiment d’impuissance et de culpabilité par rapport à la nourriture, faible estime de soi, insatisfait de son image, de son torse, de son visage, conflits familiaux et vie sentimentale perturbée, brusques changements d’humeur.


Signes physiques

Perte de poids (souvent rapide), souvent fatigué, n’arrive pas à suivre tous les entraînements, fréquents maux de tête, troubles du sommeil ou intolérance au froid, problèmes gastro-intestinaux, constipation, douleurs, colopathies, arrêt des règles, baisses de tension, malaises, bradycardie, déshydratation, se plaint d’être souvent malade, fréquence des blessures, entorses, claquages, élongations, crampes, parfois fractures de fatigue, poids trop faible pour réaliser des performances sportives.


Signes comportementaux

Suit un régime amincissant (léger ou drastique), saute des repas, consomme beaucoup d’eau ou de boissons pauvres en calories, se cache pour manger ou désire manger seul, discussions fréquentes a propos du poids ou de l’apparence physique, épisodes sporadiques de boulimie, gavage et vomissements, utilise fréquemment la balance, souhaite des apports alimentaires réglés, n’accepte que certains aliments, phobie de certains aliments, se réfugie dans les micro-nutriments ou compléments alimentaires, refuse de manger pour prendre du poids, recherche une activité physique intense et constante, bien au-delà de l’entraînement, porte des vêtements amples propres à masquer l’apparence corporelle et la maigreur.

Anorexie mentale, définition

Trouble psychiatrique sévère associant anorexie, amaigrissement (IMC > 17.5) et arrêt des règles. Cette pathologie touche essentiellement les jeunes adolescentes. Il s’agit d’une maladie grave, dont seulement 1/3 des cas vont guérir sans séquelles, et 7% à 10% auront une issue fatale par dénutrition terminale ou suicide. Le traitement actuellement admis consiste en un contrat de reprise de poids, éventuellement assorti d’un isolement, et toujours d’un accompagnement psychothérapeutique.

Retour En avant

L’exemple des troubles des conduites alimentaires

Conduite à tenir en cas d’anomalie

Rencontre avec Pierre Belleudy, médecin fédéral et médecin élu au conseil d’administration de la fédération.

Comment diagnostique-t-on un trouble du comportement alimentaire (TCA) ?

C’est en observant un ensemble de signes physiques et psychologiques, tels que les désordres alimentaires. Mais avant tout, il est important de rappeler que le TCA est une maladie, qui peut avoir des conséquences très graves, et que seul un médecin est habilité à diagnostiquer et traiter un TCA. Si le médecin qui examine un athlète, l'entraineur, la famille ou des proches suspectent cette maladie, il est impératif d’en parler à l’athlète avant tout (et à sa famille si c’est un mineur), et d’alerter le médecin traitant.


Quelles en sont les conséquences ?

Elles peuvent être très sévères si on les laisse évoluer, le risque de complications somatiques et psychiques nombreuses est très fort.

Il faut savoir qu’il s’agit de la maladie psychiatrique qui engendre le taux de mortalité le plus élevé, jusqu’à 10 % dans les études comportant un suivi de plus de dix ans. Si Le risque suicidaire est la première des conséquences, persistant même à long terme, les privations alimentaires (souvent aggravées de vomissements volontaires succédant à des accès de boulimie) seront rapidement la cause d’un amaigrissement intense, d’un arrêt des règles chez la femme (aménorrhée) et d’une ostéoporose majeure et précoce.

C’est ainsi que des jeunes femmes de 25 ans se retrouvent avec des os d’une personne de 65 ans (qui serait ménopausée et sans traitement hormonal substitutif), avec un risque fracturaire important, sans oublier également les défaillances cardiaques, l’infertilité, la désinsertion sociale, la dépression, et l’altération de la performance.


Qui peut détecter cette maladie ?

La détection de ces troubles est un des « objectifs santé » majeur du suivi médical du haut-niveau. Dans ce cadre, le médecin qui examine le sportif, le médecin fédéral ou les entraîneurs peuvent suspecter la maladie. Mais le TCA ne touche pas seulement le haut niveau, aussi, entraîneur et le dirigeant de club peuvent eux être des acteurs importants, tout comme la famille, les proches, et le médecin traitant. Dans le cadre de la fédération, nous informons les entraîneurs par des consignes précises, et mettons à leur disposition des outils de détection.


Quels sont les signes qui doivent alerter l’entraîneur, ou le dirigeant de club ?

Il existe trois catégories de signes à repérer pour l’entraîneur : des signes psychologiques (tels que se trouver trop gros malgré un poids normal, le décompte des calories, une faible estime de soi, ou de brusques changements d’humeur), des signes physiques (perte de poids rapide, fatigue, problèmes gastro-intestinaux, arrêt des règles, malaises, blessures, etc.) ainsi que des signes comportementaux (régime amincissant, se cache pour manger, obsession du poids, etc.)


Détail des signes observables


Existe-t-il des outils pour « mesurer » et détecter cette maladie?

Outre la liste de signes, il existe également un outil de dépistage, il s’agit du score de Scoff, qui consiste à poser cinq questions à un athlète. Si l’athlète répond positivement à deux questions, nous sommes dans le cas d’un trouble du comportement alimentaire (test fiable à 85%).


Score de Scoff


Existe-t-il d’autres facteurs détectables par exemple pour les familles ?

Les parents sont tout à fait capables de détecter les premiers signes de TCA. Pour cela ils doivent être parfaitement objectifs surtout quant aux conflits liés à l’environnement (pression des proches, conflit familiaux, etc.). On peut détecter un TCA en fonction du sport pratiqué, via un entraînement trop précoce, une pression de l’entraîneur sur le thème : le poids limite la performance.

D’autres signes sont liés au psychisme (obsession de la performance, crainte de l’imperfection, insatisfaction de l’image de son corps, anxiété ou faible estime de soi), et à la relation à l’alimentation (régimes dans l’enfance, inappétence fréquente, fluctuations pondérales, obsession du poids et de la silhouette).


L’escalade et le ski-alpinisme sont-ils des sports où le risque est plus important de rencontrer ce type de maladie ?

Attention, il est important de préciser que l’activité sportive ne provoque pas les TCA, mais elle peut être un prétexte pour continuer à vivre et profiter de la maladie. C’est un peu provocateur comme raisonnement, mais c’est important de le savoir. Ainsi, le sport n’est pas le facteur déclenchant de cette déviance alimentaire, il n’en est que le révélateur : « je dois maigrir encore plus pour grimper mieux ». Ce sont en fait de véritables troubles de la personnalité, retrouvés essentiellement chez la jeune adolescente, ou intervient le rapport à la nourriture au père et à la mère.

Il existe cependant quatre situations sportives qui vont favoriser la justification d'un TCA : les sports de minceur, les sports esthétiques, les sports « antigravitationnaires » et les sports d’endurance. L’escalade et le ski-alpinisme sont donc parmi les activités à risque.


Que faire cas de dérive constatée chez un athlète de haut niveau ?

L’objectif prioritaire est de préserver santé des athlètes. Ne pas hésiter à en parler directement au sportif (ou ses parents s’il est mineur), lui conseiller de consulter rapidement son médecin traitant.

Au niveau fédéral, dès qu'un trouble alimentaire est suspecté, une prise en charge spécialisée peut être proposée (diététicien, médecin, psychologue, etc.), mais toujours en relation avec le médecin traitant. L'objectif constant étant la préservation de la santé de nos sportifs

Une surveillance médicale renforcée, va être mise en place de façon à ce que l’athlète puisse continuer l’entrainement et les compétitions, sans se mettre en danger. Dans les formes sévères, nous pouvons imposer une suspension temporaire d’entraînement et compétition, voir définitive. Toutes ces démarches étant menées dans le strict respect du secret médical. Cette confidentialité et cette confiance sont essentielles pour que le malade puisse oser parler au médecin de son problème et se faire soigner sans réticence.


Les TCA sont-ils possibles à prévenir ?

Prévenir ce n’est pas dépister. Dans la mesure où il s’agit de troubles de personnalité qui trouvent leur origine dans la petite enfance et les rapports avec les parents, la nourriture et la sexualité, la seule action de prévention possible pour l’entraîneur sera de ne pas favoriser de tels comportements. Ne pas abonder dans le sens du régime erratique. Eviter par exemple les pesées en public, ou encore, faire l’éloge de l’habileté et des résultats et non de l’apparence ou des variations de poids. Enfin, encourager le sportif à se fixer une limite raisonnable d’entraînement et de performance et savoir repérer le surentraînement. Et surtout, être à l’écoute des signes premiers de désordre alimentaire.


Anorexie, définition


Quel est rôle des entraîneurs et dirigeants de club ?

Il est impératif de souligner que l’entraîneur et le dirigeant de club ne sont pas chargés de la prise en charge thérapeutique. C’est une erreur récurrente !!! Ni l’un ni l’autre n’ont les compétences et les outils nécessaires pour soigner les TCA. Je me répète, il faut, en cas de détection, alerter l’athlète ou la famille si l'enfant est mineur ainsi que le médecin traitant.

Le rôle des dirigeants de club, et d’aider à la diffusion des messages de prévention sur le sujet, ne pas sacrifier la santé au profit de la performance. Enfin il est important de valider et relayer dans les clubs, les CD, les CR, les objectifs fédéraux de préservation de la santé.

Orientez votre tablette horizontalement pour profiter des contenus enrichis.

logo1000X400-copie.png Notre Emag ne prend pas en charge la lecture sur mobile pour le moment. Nous vous invitons à le consulter sur tablette ou ordinateur. Continuer tout de même