FFME iMag - Le magazine de la Fédération Française de la Montagne et de l’Escalade - 7 : Décembre 2015

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7-autop-gaut1.jpg Gautier Supper termine deuxième de la Coupe du monde 2015 de difficulté, derrière Adam Ondra et devant Jakob Schubert (AUT)
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Gautier gagnait sa première Coupe du monde à Briançon, devant son public
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Gautier Supper remettait le couvert en Norvège
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Gautier Supper, en quête d'alchimie

Aux yeux du public, Gautier Supper a explosé cette saison. Prenant deux victoires en Coupe du monde et une deuxième place au classement général, il a inscrit son nom aux côtés de ceux des plus grands spécialistes de la difficulté au monde. Voilà ce que la planète grimpe retiendra. Mais toi, Gautier, comment as-tu vécu cette remarquable saison 2015 ?

C'est inimaginable ce qu'il se passe dans la tête d'un athlète. Pour ceux qui ont vu Gautier s'avancer d'un pas déterminé vers le mur durant cette saison de Coupe du monde, vous vous l'êtes peut-être demandé : à quoi peut-il bien penser dans un moment d'une telle intensité ?


Vous aurez beau lui poser la question, vous n'obtiendrez pas de réponse évidente. Et pour cause : ce qu'il se passe dans sa tête à ce moment précis ne peut être résumé. C'est le nerf de la guerre. A ce moment là, à ce niveau là, sa confiance, son détachement, sa détermination sont les seules choses qui comptent sportivement. Ces sensations sont non seulement le moteur de sa réussite, mais elles sont aussi ce qui légitime – à ses yeux – tant d'années d'effort.


Le moteur de la réussite


On a évoqué des pistes. Ses résultats cette saison sont-ils le fruit d'une progression continue jusqu'à sa consécration en 2015 ? Ou bien le résultat de changements dans sa préparation ? Gautier Supper ne nie pas tout en bloc. Certes, il n'a cessé de progresser ces dernières années. Mais pour être honnête, ce n'est pas si simple. Gautier n'a pas connu une évolution linéaire jusqu'au plus haut niveau : avant 2015, sa meilleure saison en Coupe du monde, il la date à 2010. Il terminait 6e du général et montait sur son premier podium.


Puis il y a eu des hésitations. Des bons résultats et des accros. « Mais chaque année, même si je ne montais pas souvent sur les podiums, je me disais toujours que la victoire n'était pas passée loin. Le cap vers la victoire est dur à passer. Et – même si les aspects physiques sont incontournables – cela se passe beaucoup dans le tête. » Il n'a pas tort Gautier, en escalade de difficulté, la différence entre le dernier finaliste et le vainqueur de l'étape est parfois infime. « C'est ce qui fait la beauté de l'escalade et de la compétition en général, ça se joue souvent à pas grand chose... »


Mais à la fois, cela implique un large éventail de facteurs : quels leviers a-t-il actionné cette saison pour faire la différence ? Il y a eu des changements dans sa préparation, Gautier ne le nie pas non plus. Cela a eu un impact. Il s'est entrainé quotidiennement à Voiron – au Pôle France d'escalade – avec comme entraîneurs, chaque jour, le staff de l'équipe de France, Corentin Le Goff et Marianne Berger.


« J'ai eu plus d'autonomie et ai bénéficié d'une approche différente de l'entraînement. Dans ma vie quotidienne, j'ai trouvé un meilleur équilibre entre mes études, mon projet d'entreprise – Climbing Family – et les sorties falaises avec les copains. Côté grimpe, on s'est concentré sur mes points faibles, la souplesse, les petites prises. Globalement on a travaillé pour que je me prémunisse au mieux de la pression du résultat. Pour que je grimpe libéré. Et le résultat, c'est que j'allais chaque jour à l'entraînement avec le sourire », analyse le champion.


Tout cela a assurément concouru à ses bons résultats cette saison. Mais à l'écouter, on sent que pour lui, l'essentiel est ailleurs : « il y a d'abord le plaisir de concourir à ce niveau là. Certains se mettent une pression dingue. Moi – sincèrement – je suis juste content d'être là où j'en suis aujourd'hui. Concernant la réussite en compétition, cela implique un tel nombre de facteurs qu'il m'est impossible de désigner l'aspect qui a été déterminant. Selon moi, une compétition réussie ce sont avant tout des sensations sur le mur. De bonnes sensations sont souvent synonymes de bons résultats, et inversement d'ailleurs. », explique Gautier Supper.


L'athlète français de poursuivre : « ce qui est sûr c'est que ce qui est vraiment important pour moi ce sont les sensations. Pas les résultats ». Ne vous détrompez pas : il n'est pas question de posture romanesque dans ses propos, le champion nous livre ici le cœur de sa motivation : « à Briançon par exemple, les sensations étaient magiques. Je prends la première place des demi-finales après des qualifications calamiteuses. Il n'est pas évident de tout remettre en jeu dès le lendemain : à cet instant précis, on est le meilleur au monde. »


Mais être le champion des tours préliminaires n'a qu'un intérêt limité. « Le plus dur est de retourner sur le mur comme si rien ne s'était passé. En repartant à zéro, sans penser qu'on a déjà été le plus fort. Et ce jour-là, j'y suis parfaitement arrivé. C'est ma plus grande fierté cette saison. Ce soir là, j'ai bien grimpé, je me suis régalé sur le mur et en plus à la clé il y a eu un résultat. » Le scénario parfait : Gautier Supper remporte sa première étape de Coupe du monde, en compagnie de ses proches – venus au Fort de Briançon pour l'occasion – et devant son public : voilà une soirée que le jeune homme n'oubliera pas de si tôt. « Un moment de partage extraordinaire avec tout le monde. Et je vous l'assure : le plus important n'a pas été le résultat dans cette équation... »


La légitimité de tant d'années de pratique


Voilà donc après quoi court Gautier Supper : des sensations de grimpe. « C'est ce qui fait leur beauté, ça arrive comme ça, c'est dur à prévoir. On ne sait pas pourquoi ces jours-là, on vole sur les prises. Et parfois c’est l’inverse, on se sent lourd, on n’avance pas dans les mouvements. Peu importe son niveau de pratique, on peut tous retrouver ces sensations. Les "moments de grâce" sont précieux et sont à l'origine de mon amour pour l'escalade. Je peux parfois les retrouver sur un 7c en falaise avec des copains. Mais c'est sûr que ces sensations ont d'autant plus de résonance lorsqu'elles surviennent en finale d'une Coupe du monde. »


Gautier sera cette année de toutes les finales. Souvent en tête dans les tours préliminaires. La plupart du temps au sommet des voies de qualification. Il doublera même la mise à Stavanger (NOR) quelques mois plus tard, prenant sa deuxième victoire de la saison.


S'il ne parvient pas à garder sa première place au classement général jusqu'au bout – devancé par Adam Ondra dans la dernière étape de Kranj (SLO) - il signe tout de même cette saison une incroyable performance : « un résultat extraordinaire que l'on attendait depuis de nombreuses saisons », commentent de leur côté les entraîneurs de l'équipe de France de difficulté. « C'est l'accomplissement de beaucoup d'années de travail, pour un champion qui a été formé en club, puis au Pôle France de Voiron. »


Déçu par ce titre manqué, arraché sur le fil par le Tchèque ? « Non. Je sais que – comme d'autres – j'ai le potentiel d'être devant. Je sais aussi pourquoi je ne le suis pas finalement. Une fin de saison certainement parasitée par des événements extérieurs, qui ne m'ont pas permis d'être parfaitement libéré dans ma grimpe. Sûrement aussi la pression du leadership », commente le champion. « Je suis très fier de ce résultat. Et puis encore une fois, ce n'est pas le plus important pour moi. »


Gautier ne transige pas sur ce point. S'il grimpe depuis toute ces années, ce n'est pas pour être en tête au tableau des résultats. Ce n'est pas la raison principale qui fait que chaque jour il travaille si dur. Gautier est la recherche cette fine alchimie qui fait le run parfait. Voilà pourquoi le champion conçoit une vie sans compétition, un jour, mais pas sans escalade. Mais rassurez-vous, ce jour n'est pas encore arrivé : « je me suis accordé un mois d'arrêt total et un mois de reprise « plaisir ». Ensuite je me remettrai au travail, car l'année prochaine sera une saison bien remplie... ».


L'année prochaine il y a les Championnats du monde à Paris. Et Gautier Supper l'assure, ce challenge là, il compte bien le relever.

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